Mémoire au Comité permanent des finances

de l’Association canadienne des programmes de ressources pour la famille (FRP Canada)

707 – 331, rue Cooper, Ottawa (Ontario)  K2P 0G5

Résumé

Nous recommandons au gouvernement fédéral d’adopter une vision à long terme dans ce budget en cernant les priorités et les stratégies qui permettront de régler des problèmes complexes à long terme au lieu de concentrer ses efforts sur des résultats à court terme.

Depuis 35 ans, FRP Canada se consacre à répondre aux besoins des personnes qui travaillent auprès des familles et des jeunes enfants vivant dans les diverses régions du Canada. Les organisations membres de cette association offrent un large éventail de services à des milliers de familles, et ce, à chaque mois. Au nombre des composantes du Programme, on compte les programmes prénataux, les activités destinées aux enfants majeurs, les programmes d’alphabétisation familiale, les échanges de vêtements, les échanges de jouets et d’équipement, les cuisines communautaires, les groupes d’éducation familiale, les groupes ALS (anglais, langue seconde), les programmes de maturité scolaire, les renvois à d’autres services et plus encore, selon les besoins des collectivités.

Les parents et les familles exercent une influence importante sur leurs enfants, même encore plus importante que les enseignants et les écoles. Pendant la période qui s’étend de l’étape de la conception jusqu’à l’âge d’environ trois ans, les enfants sont particulièrement sensibles aux influences positives ou négatives, et les effets de ces influences sont durables. Par exemple, une recherche hautement considérée a démontré clairement l’association entre les mauvaises expériences vécues durant l’enfance et l’augmentation des problèmes de santé chez les adultes, notamment les maladies du cœur, les dommages au foie, les maladies respiratoires obstructives, la dépression et plus encore (consulter le site www.cdc.gov/ace/findings.htm).

Si le gouvernement fédéral désire réduire les coûts associés aux systèmes, notamment pour les systèmes en lien avec les différents domaines de la santé, la protection de l’enfance, l’éducation, les services sociaux et de justice pénale, il doit envisager de procéder à davantage d’investissements stratégiques à l’appui des familles et des jeunes enfants.

RECOMMANDATIONS

  1. Maintenir ou, si possible, augmenter les ressources financières consacrées aux programmes de soutien financés par le gouvernement fédéral, notamment le Programme d’action communautaire pour les enfants (PACE), le Programme canadien de nutrition prénatale (PCNP) et le Programme d’aide préscolaire aux Autochtones (dans les régions urbaines et dans les réserves).
  2. Affecter des ressources pour soutenir l’élaboration d’une politique familiale nationale complète.
  3. Continuer de soutenir la collecte et l’analyse des données de l’Enquête longitudinale

Mémoire au Comité

de l’Association

707 – 331, rue Cooper, Ottawa (Ontario)  K2P 0G5

« Rien n’est plus important au monde aujourd’hui que l’affection que reçoivent les enfants durant les trois premières années de leur vie, puisque c’est au cours de ces années qu’ils développent leurs capacités de confiance, d’empathie et d’affection. Si les besoins affectifs de l’enfant ne sont pas comblés pendant ces années, des dommages affectifs permanents peuvent être engendrés. […] Cela est comparable au fait de couler le ciment. Si on ne mélange pas le produit correctement, on obtient un produit fini non convenable, et il faut une masse pour le défaire. Il s’agit d’un processus lent, difficile et pratiquement impossible à réaliser. Au cours des trois premières années de la vie de l’enfant, le ciment se fige et [nous] devons mettre toute autre priorité de côté en vue de faire de [notre] mieux. » [Traduction] Elliott Barker, M.D., présentation à l’intention du Sous-comité sur la délinquance imputable aux expériences de l’enfance du Sénat, Sénat du Canada, 6 décembre 1977.

Adopter une vision à long terme

FRP Canada reconnaît bien les défis que doit relever le Comité permanent des finances, étant donné que celui-ci élabore un budget qui doit favoriser la croissance continue et la prospérité au Canada tout en tentant d’assurer le bien-être de tous les Canadiens.

Parfois, les décisions budgétaires et stratégiques semblent être influencées par la volonté d’obtenir des résultats à court terme, où l’objectif principal consiste à remporter la prochaine élection. Cela empêche le gouvernement de se concentrer sur l’élaboration de stratégies de portée plus vaste afin de régler des problèmes complexes qui préoccupent vraiment les Canadiens.

FRP Canada croit que le gouvernement a l’occasion d’adopter une nouvelle approche grâce à la stabilité politique actuelle. Un budget réfléchi qui vise principalement à renforcer les structures de base de la société et dans le cadre duquel on aura recours à des approches progressives pour atteindre les résultats désirés d’ici les 5, les 15 et même les 50 prochaines années permettra de démontrer la capacité du gouvernement d’assurer une planification à long terme pour favoriser un avenir viable pour nos enfants et nos petits-enfants.

À propos de FRP

Depuis 1976, FRP Canada (www.frp.ca) offre des renseignements, des ressources et des occasions d’apprentissage aux membres du personnel de centaines d’organismes communautaires du Canada. En retour, ces intervenants offrent des services à des milliers de familles ayant des enfants en bas âge et d’âge préscolaire. Les programmes ou les centres de ressources pour les familles sont désignés de plusieurs façons, notamment centre de la petite enfance, Parent Link Centre, Centre de ressources pour les familles des militaires (CRFM), Family Place et organisme communautaire à la famille. Ces organismes soutiennent les familles pendant les étapes de la grossesse et du développement du jeune enfant, des périodes très importantes qui auront une influence sur les résultats à long terme pour les enfants. Pour un grand nombre de parents, le centre local de ressources familiales remplace la famille élargie traditionnelle. Elle devient leur source d’éducation parentale de confiance et constitue un point d’accès convivial pour les autres services communautaires et un endroit pour se perfectionner et développer une plus grande confiance.

Les parents et les familles exercent la plus grande influence sur le développement des enfants

Selon notre expérience personnelle et de nombreuses études, les parents et les familles exercent une influence bien supérieure sur le bien-être de leurs enfants que toute autre personne ou tout autre établissement, notamment les fournisseurs de services de garde d’enfants, les professionnels de la santé, les enseignants ou les écoles. Nous savons que si un enfant bénéficie d’un soutien solide pendant la période qui s’étend de l’étape de la conception jusqu’à l’âge d’environ trois ans, il aura tendance à mieux réussir dans la vie et à contribuer aux ressources financières du pays plutôt qu’à dépendre de la société. Certains facteurs comme la chaleur et la structure parentales contribuent au développement sain de l’enfant. D’autres facteurs comme la pauvreté, la dépression, la négligence parentale, la mauvaise nutrition, la violence faite aux enfants et la négligence entraînent souvent des résultats négatifs qui peuvent s’avérer coûteux.

Historique du financement octroyé par le gouvernement fédéral à l’appui des programmes de ressources familiales

Le gouvernement fédéral comprend depuis longtemps l’importance du soutien familial, en particulier pendant les années où les enfants sont jeunes. Les premiers programmes pilotes en matière de ressources familiales ont été soutenus au moyen d’un financement octroyé par le ministère de la Santé nationale et du Bien-être social (maintenant Santé Canada) au milieu des années 1970. Plus récemment, grâce à des accords conclus en 2000 dans le cadre de l’Initiative de développement de la petite enfance (IDPE), le gouvernement fédéral a transféré des fonds aux provinces et aux territoires afin de soutenir les diverses initiatives de développement de la petite enfance. Ce financement a été octroyé en partie aux centres de ressources pour les familles. De plus, plusieurs centaines de projets destinés aux familles ayant de jeunes enfants sont financés directement par des programmes de l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC), par exemple, le Programme d’action communautaire pour les enfants (PACE), le Programme canadien de nutrition prénatale (PCNP) et le Programme d’aide préscolaire aux Autochtones (PAPA). Depuis le milieu des années 1990, le ministère de la Défense nationale finance les Centres de ressources pour les familles des militaires (CRFM) à chacune des escadres et des bases. Ces centres offrent diverses formes de soutien important aux familles des militaires.

La prévention comme approche permettant de réduire les coûts

Les programmes de ressources familiales mettent l’accent sur la promotion de la santé. Quant aux initiatives de prévention, leur rentabilité est difficile à quantifier. Toutefois, au moment d’examiner les coûts connus de certains résultats évitables, notamment l’insuffisance de poids à la naissance, la violence envers les enfants, la dépression maternelle, la reprise d’années scolaires et les classes d’appoint, l’isolement social, le chômage et les comportements criminels, nous commençons à constater à quel point ces programmes communautaires de soutien aux familles peuvent être rentables.

Par exemple, les bébés ayant une insuffisance de poids à la naissance engendrent des frais hospitaliers plus élevés que ceux nés normalement, et ceux-ci sont davantage susceptibles de connaître des problèmes de santé et de développement plus tard au cours de leur vie, notamment des difficultés d’apprentissage, des déficiences auditives et visuelles, des maladies respiratoires chroniques comme l’asthme et des maladies chroniques. Les coûts en soins de santé en lien avec une insuffisance de poids à la naissance qu’il faut assumer tout au long de sa vie sont estimés à plus de 300 000 $ par naissance. Certaines initiatives communautaires qui visent à réduire la fréquence des cas d’insuffisance de poids à la naissance, notamment le Programme canadien de nutrition prénatale, permettent de réduire les risques associés à une insuffisance de poids à la naissance en offrant du soutien affectif aux mères à faible revenu, des suppléments nutritionnels, des programmes d’abandon du tabagisme ainsi que d’autres formes de soutien, qu’elles soient tangibles ou non.

Les plus célèbres études portant sur les expériences négatives au cours de l’enfance réalisées par les Centers for Disease Control and Prevention et le Kaiser Permanente aux États-Unis et soutenues par des chercheurs canadiens démontrent un lien étroit entre les expériences négatives au cours de l’enfance et l’augmentation du risque de souffrir de problèmes de santé plus tard dans la vie, notamment des maladies pulmonaires obstructives chroniques, la dépression, la consommation de drogues, des maladies du cœur, des dommages au foie ainsi que d’autres maladies. (Consulter le site www.cdc.gov/ace/findings.htm.)

En aidant les parents à relever les défis de taille auxquels ils font face et qui sont attribuables au fait d’élever de jeunes enfants, les programmes de ressources destinées aux familles permettent de réduire les dépenses à court et à long terme dans les systèmes de santé mentale et physique, le système de protection de l’enfance, le système d’éducation et le système de justice pénale. Bien que certaines de ces responsabilités ne relèvent pas de la compétence fédérale, le type de leadership exercé par le gouvernement fédéral, offrant des contributions financières carrément modestes, pourrait avoir un effet d’entraînement énorme.

RECOMMANDATIONS

  1. Maintenir ou, si possible, augmenter les ressources financières consacrées aux programmes de soutien financés par le gouvernement fédéral, notamment le PACE, le PCNP et le Programme d’aide préscolaire aux Autochtones (dans les villes et dans les réserves). Le financement octroyé au PACE et au PCNP n’a pas augmenté depuis la mise en œuvre des programmes 12 ans auparavant, et ce, même si l’ampleur des programmes et le nombre de familles servies continuent de croître. Ces organisations sont au maximum de leur capacité et ignorent en quoi consistera l’engagement du gouvernement pour les années à venir. Elles sont rentables, règlent des problèmes de base touchant la société et méritent le soutien continu et généreux du gouvernement.
  2. Affecter des ressources pour soutenir l’élaboration d’une politique familiale nationale complète. Contrairement à de nombreux autres pays, le Canada n’a mis en place aucune politique familiale complète visant à alléger le fardeau des parents et à offrir les meilleures chances possibles dans la vie à ses plus jeunes citoyens. Les couples doivent relever plusieurs défis, notamment le remboursement de leur dette d’études, les aspirations professionnelles des femmes, les coûts élevés associés au fait d’élever des enfants ainsi que la difficulté de trouver des services de garde abordables et de qualité. Ces pressions font en sorte de retarder les premières grossesses (ce qui entraîne des coûts élevés en soins de santé) et de faire diminuer le taux de natalité. À l’heure actuelle, le gouvernement fédéral dépend du revenu provenant de l’impôt sur le revenu perçu auprès des mères qui travaillent alors que leurs enfants sont très jeunes. Les parents ayant de jeunes enfants sont soumis à d’énormes pressions, ce qui fait en sorte que leurs enfants développent plus fréquemment des problèmes d’anxiété et de dépression. L’augmentation du nombre d’activités sédentaires chez les enfants ainsi que du nombre d’heures qu’ils passent devant la télévision ou un écran d’ordinateur, de même que le manque d’attention de la part des parents en raison de certaines distractions comme les dispositifs technologiques personnels et les obligations professionnelles contribuent à faire augmenter les risques que les enfants souffrent éventuellement de problèmes affectifs et de santé, même si ceux-ci n’en montrent pourtant aucun signe pour l’instant. FRP Canada serait heureuse de prendre part aux discussions visant à cerner diverses options qui permettront de soutenir l’ensemble des familles canadiennes, y compris les parents qui désirent passer plus de temps avec leurs jeunes enfants.
  3. Continuer de soutenir la collecte et l’analyse des données de l’ELNEJ. L’ELNEJ s’est révélée extrêmement utile pour cerner les facteurs qui contribuent à l’obtention de résultats sains ou malsains. Ce vaste ensemble de données, qui concerne environ 20 000 enfants, et ce, dès leur plus jeune âge jusqu’au début de l’âge adulte, a permis de déterminer les styles parentaux efficaces (et inefficaces), en plus de donner un meilleur aperçu des facteurs qui contribuent au développement sain de l’enfant.

Je transmets mes meilleurs vœux au comité qui devra déterminer les priorités du gouvernement pour l’année à venir. Je vous prie d’agréer l’expression de mes sentiments respectueux,

Janice MacAulay, directrice générale